Les effets de la sous-emploi déguisé (ou « chômage déguisé »)
La sous-emploi déguisé, souvent appelée « chômage déguisé », fait référence à une situation où un individu est employé mais où la productivité de son travail est nettement inférieure à son potentiel réel, ou bien où son emploi ne correspond pas à ses compétences. Ce phénomène est courant dans des pays en développement, mais il peut également être observé dans des économies plus avancées. Ses effets sur la société et l’économie peuvent être insidieux et complexes, contribuant non seulement à un gaspillage de ressources humaines, mais également à des déséquilibres économiques et sociaux.
Définition et caractéristiques de la sous-emploi déguisé
Le chômage déguisé se manifeste de plusieurs manières. Il peut toucher des personnes qui :
- Exercent un travail peu productif : Ces individus sont occupés à des tâches qui n’exploitent pas pleinement leurs capacités ou qui n’apportent que peu de valeur ajoutée à l’économie. Cela est fréquent dans des secteurs comme l’agriculture ou dans des emplois bureaucratiques où les tâches sont souvent redondantes.
- Travaillent à temps partiel, mais souhaitent un emploi à plein temps : Ces personnes sont techniquement employées, mais elles désirent travailler plus d’heures. Cependant, l’économie ne leur offre pas cette opportunité.
- Détiennent des emplois ne correspondant pas à leurs compétences : Il peut s’agir de personnes surqualifiées, comme un ingénieur travaillant comme serveur ou un médecin exerçant un métier administratif. Ces individus sont souvent contraints d’accepter des emplois en deçà de leur niveau de formation par manque de meilleures opportunités.
Les causes de la sous-emploi déguisé
Plusieurs facteurs peuvent mener à la sous-emploi déguisé. Parmi eux :
- Développement économique insuffisant : Dans certains pays en développement, l’économie ne se développe pas assez vite pour offrir des emplois de qualité à toute la population active. Cela peut entraîner une concentration d’emplois dans des secteurs où les gains de productivité sont faibles, comme l’agriculture ou le secteur informel.
- Surpopulation relative dans certaines industries : Dans certains pays, des secteurs comme l’agriculture emploient un grand nombre de personnes pour des tâches qui pourraient être réalisées par un nombre plus restreint de travailleurs, ce qui entraîne une sous-utilisation des compétences et des efforts.
- Marché du travail mal structuré : Un manque de correspondance entre les compétences des travailleurs et les besoins du marché peut créer une situation où des personnes qualifiées acceptent des emplois en deçà de leur niveau de compétence simplement pour subvenir à leurs besoins.
- Rigidité dans l’économie : Dans des économies où la mobilité professionnelle est limitée (par exemple, en raison de barrières à l’entrée dans certains secteurs ou de politiques qui découragent l’innovation), les individus peuvent être contraints d’accepter des emplois qui ne leur permettent pas d’exploiter pleinement leur potentiel.
Les conséquences économiques
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Gaspillage de capital humain : La sous-emploi déguisé représente un gaspillage significatif du capital humain. Lorsqu’une personne travaille à un poste qui ne correspond pas à ses qualifications, ses compétences demeurent sous-exploitées, réduisant ainsi son apport à la productivité globale. Cela signifie qu’une partie de la main-d’œuvre reste sous-utilisée, ce qui ralentit la croissance économique.
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Réduction de la productivité : Un des effets directs du chômage déguisé est la baisse de la productivité par travailleur. Dans une entreprise ou un secteur où le nombre de travailleurs excède les besoins réels, la productivité par employé diminue. Cela a un impact négatif sur la rentabilité des entreprises et la compétitivité d’un pays sur la scène internationale.
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Ralentissement de la croissance économique : En empêchant une allocation optimale des ressources, notamment du capital humain, la sous-emploi déguisé freine la croissance. Si une grande partie de la population active est coincée dans des emplois peu productifs, la capacité d’un pays à innover et à croître est limitée.
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Coût d’opportunité élevé : Lorsqu’un pays ne parvient pas à exploiter pleinement son potentiel de main-d’œuvre, il sacrifie des opportunités économiques. Les talents qui pourraient être utilisés dans des secteurs à plus forte valeur ajoutée sont gaspillés dans des emplois à faible productivité.
Les effets sociaux
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Frustration professionnelle et démotivation : Travailler dans un emploi qui ne correspond pas à ses compétences peut conduire à une frustration profonde. Les individus peuvent perdre leur motivation à s’améliorer ou à chercher de nouvelles opportunités, créant un cercle vicieux de stagnation professionnelle.
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Inégalités sociales croissantes : La sous-emploi déguisé aggrave les inégalités. Les travailleurs qualifiés mais sous-employés gagnent souvent moins que ce qu’ils pourraient espérer dans des emplois adaptés à leurs compétences. Cela entraîne des frustrations sociales et peut exacerber les disparités entre différentes classes de la société.
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Migration des talents : Face à un manque de perspectives d’emplois qualifiés dans leur pays d’origine, de nombreux travailleurs qualifiés choisissent de migrer vers d’autres pays où ils espèrent trouver de meilleures opportunités. Cette fuite des cerveaux peut priver un pays de ses talents les plus prometteurs et exacerber encore la sous-emploi déguisé chez ceux qui restent.
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Impact sur la santé mentale : La frustration professionnelle et le sentiment d’inutilité liés à la sous-emploi déguisé peuvent également avoir des répercussions sur la santé mentale des individus. L’anxiété, la dépression et un sentiment d’échec personnel sont fréquents chez ceux qui estiment ne pas exploiter pleinement leur potentiel.
Solutions pour lutter contre la sous-emploi déguisé
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Politiques actives de l’emploi : Les gouvernements doivent adopter des politiques d’emploi qui facilitent la création de nouveaux emplois, notamment dans des secteurs à haute valeur ajoutée. Cela passe par des investissements dans l’innovation, la recherche et le développement, ainsi que par la promotion de secteurs comme la technologie et les services.
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Formation continue et reconversion : Il est essentiel que les travailleurs aient la possibilité d’acquérir de nouvelles compétences tout au long de leur carrière. Des programmes de formation continue, ainsi que des politiques de reconversion professionnelle, permettent de rediriger les travailleurs vers des secteurs où la demande de main-d’œuvre est forte.
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Encouragement de la mobilité professionnelle : Les gouvernements et les entreprises doivent encourager la mobilité professionnelle en assouplissant les réglementations qui empêchent le déplacement des travailleurs d’un secteur à un autre. Cela peut inclure des réformes du droit du travail ou des incitations à la mobilité géographique.
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Développement de secteurs dynamiques : La diversification de l’économie est essentielle pour réduire la sous-emploi déguisé. En encourageant le développement de secteurs porteurs comme les technologies de l’information, les énergies renouvelables ou le tourisme, les gouvernements peuvent créer des opportunités d’emploi adaptées aux compétences disponibles dans le pays.
Conclusion
La sous-emploi déguisé est un phénomène complexe aux effets économiques et sociaux néfastes. Bien qu’il soit moins visible que le chômage classique, il représente un défi majeur pour les économies, en particulier dans les pays en développement. En freinant la productivité et la croissance, en exacerbant les inégalités sociales et en affectant la motivation professionnelle des individus, il s’agit d’une problématique qui mérite une attention particulière de la part des décideurs publics et des acteurs économiques. Pour résoudre ce problème, des politiques proactives visant à réformer le marché du travail, à promouvoir l’éducation et la formation, et à encourager la mobilité professionnelle sont indispensables.